Sonnet de Louise Labé

Baise m’encor, rebaise-moi et baise ;

Donne m’en un de tes plus savoureux,

Donne m’en un de tes plus amoureux ;

Je t’en rendrai quatre plus chauds que braise.

Las ! te plains-tu ? Çà, que ce mal j’apaise,

En te donnant dix autres doucereux.

Ainsi, mêlant nos baisers tant heureux,

Jouissons-nous l’un de l’autre à notre aise.

Lors double vie à chacun en suivra.

Chacun en soi et son ami vivra.

Permets m’Amour penser quelque folie :

Toujours suis mal, vivant discrètement,

Et ne me puis donner contentement

Si hors de moi ne fais quelque saillie.

Louise Labé,
in Œuvres Poétiques,

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