L’amour meurt rarement de mort subite.
Il meurt presque toujours d’une maladie de langueur, beaucoup plus longue que ne le voudraient ceux qui en son atteints. C’est une observation qu’ont faite plusieurs poètes érotiques.
Difficile est longum subito deponere amorem.
(Catulle.)
« Il est difficile de se défaire tout à coup d’un long amour. »
Longus at invita pectore sedet amor.
(Ovide.)
« Mais le cœur malgré lui conserve un long amour. »
Cette ténacité de l’amour chez des personnes qui ne demanderaient pas mieux que d’en être affranchies est produite par l’habitude, par la paresse de changer, par la difficulté de former une nouvelle liaison, par l’impossibilité de vivre seul, et par beaucoup d’autres causes qui font qu’on a bien de la peine à rompre quand on ne s’aime déjà plus, et à plus forte raison quand on s’aime encore un peu. Tant que l’amour dure, dit la Bruyère, il subsiste de lui-même et quelquefois par les choses qui semblent le devoir éteindre, par les caprices, par les rigueurs, par l’éloignement, par la jalousie. » (Ch. iv, du Cœur.) L’indignité même de l’objet qui l’a inspiré ne parvient pas toujours à lui donner une mort soudaine :
Longtemps on aime encore en rougissant d’aimer.
(Saurin.)
On l’a justement comparé au feu grégeois qui brûle sous les flots de la mer, et à la chaux vive que l’eau dont on l’arrose allume ou met en ébullition. Pauvres belles délaissées, n’espérez pas l’éteindre à force de pleurer. Toutes ces larmes qui vous retombent sur le cœur ne servent qu’à le rendre plus ardent.
C’est le temps et non la volonté qui met fin à l’amour, dit le proverbe latin :